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Ni Droite, Ni Gauche, Français...
1 janvier 2007

Fallait-il vraiment voter Chirac en 2002 ?

CHIRAC1Au moment où l'UMP autorise ses élus à parrainer la candidature de Jean-Marie Le Pen, président du Front National, on peut se poser la question si le fait d'avoir voté Jacques Chirac, le 5 mai 2002, fut vraiment utile. Formulons plutôt cette question : est-il encore condamnable de ne pas avoir voté Chirac au second tour de l'élection présidentielle de 2002 ?

Cette question est d'actualité. Comme en 2002, tous les critères pour un retour de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle sont réunis. Les sondages mettent en avant pour 2007 deux candidats potentiels pour les partis gouvernementaux de gauche et de droite. Et comme à chaque fois, le président du Front national demeure en embuscade dans les intentions de vote supposés des sondés. En réalité, la colère des Français gronde comme à la veille de 2002.

Revenons aux événements de 2002. Après le choc du 21 avril, l'ensemble de la classe politique avait appelé à voter pour le candidat "républicain", Jacques Chirac. Pour les plus fatalistes, ce fut plutôt le devoir de voter pour le moins pire des deux candidats. S'ensuivirent d'autres appels, souvent très démagogiques, à voter pour le président sortant, le tout "au nom de la démocratie". De leur côté, nombre de jeunes électeurs exprimèrent publiquement leur dégoût par l'expression : "Chirac escroc, Le Pen facho !"

Dans cette vague d'unanimité en vue de faire barrage au président du Front National, ni réflexions, ni débats furent autorisés durant l'entre-deux-tours. Le président sortant refusa notamment de débattre avec Jean-Marie Le Pen qui promettait de son côté de "faire sonner les casseroles" du premier.

Surprise. le 1er novembre dernier, c'est l'ancien Premier ministre, Lionel Jospin, qui est venu nourrir le doute sur l'utilité du vote en faveur de Jacques Chirac, le 5 mai 2002. En effet, en réponse à une internaute sur son blog, Lionel Jospin se souvient : "Plusieurs dirigeants socialistes ont appelé à voter Chirac dès le dimanche soir. J'ai pensé qu'un temps de réflexion et d'analyse politique aurait été utile. Mais le mouvement s'est emballé. Y avait-il un réel danger fasciste en France ? Fallait-il poser des conditions à un vote en faveur du Président sortant ? Rien de tout cela n'a été débattu. Je l'ai toujours regretté."

Ses interrogations ne visaient pas à légitimer un vote pour le candidat de l'extrême-droite. Mais elles déplaçaient la réflexion sur la culpabilité supposée que pouvait avoir l'électeur n'ayant pas donné sa voix à Jacques Chirac en 2002. En effet, à l'image d'Arlette Laguiller, l'électeur qui n'avait pas voté Chirac fut souvent l'objet de la vindicte des bien-pensants.

La démocratie ne fut pas mise en danger par le choix de l'abstention entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen. Le véritable ébranlement démocratique fut le 21 avril 2002. Ce jour fut marqué par plusieurs facteurs imprévisibles : la médiatisation des actes de violence, la redondance des sondages favorables à Lionel Jospin ou Jacques Chirac, l'explosion de l'abstentionnisme passif, etc... Au final, celles et ceux qui s'abstinrent ou votèrent blanc et nul, le 5 mai 2002, furent dans leur majorité des électeurs ayant déjà voté au premier tour. Pris à la gorge par l'incivisme et enrageant contre ces absents du premier tour qui les appelaient du jour au lendemain à voter sans réfléchir pour Jacques Chirac, ces électeurs refusèrent l'évidence démagogique qu'on leur imposait.

Ces derniers eurent-ils finalement torts ? Les mêmes politiques, qui avaient appelé à voter Jacques Chirac, réclamèrent au président réélu de respecter la pluralité du vote dont il bénéficia face au candidat du Front National. Sans surprise, Jacques Chirac ne respecta pas cet appel, créant son mouvement politique visant à lui donner une majorité parlementaire, l'UMP. Et comble de la contradiction, les électeurs lui donnèrent cette majorité inespérée, en juin 2002.

En conclusion, la démocratie fut-elle réellement mise en danger par une abstention de l'électeur, le 5 mai 2002 ? La réponse est non. Jean-Marie Le Pen fut présent au second tour de la présidentielle de 2002 par le vote démocratique. La république et son système démocratique furent bel et bien remises en cause par l'incivisme des électeurs du premier tour et par le fait de donner ensuite une majorité à un président sans parole, mais également par l'inertie des candidats et la manipulation des médias.

"Les Français sont des veaux !" disait le Général de Gaulle. En effet, quel peuple peut donner un blanc-seing à un président de la République sortant, qualifié d'"escroc" avant le premier tour, devenu ensuite "sauveur" de la république au second tour et finissant comme fossoyeur de sa parole donnée dès sa réélection ? Avec le 21 avril 2002, le Général avait, hélas, encore vu juste...

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